Dernière mise à jour : juillet 2018
Christian Rambaud
« L’Europe va dans le bon sens, mais il reste encore du travail, notamment de communication auprès des consommateurs. »
Arrivé à la Commission européenne en 1986, Christian Rambaud a occupé différents postes autour de la thématique pêche. Il a vu évoluer le secteur sur plus de 25 ans, en faisant le constat d’une raréfaction des ressources suivie d’une prise de conscience progressive par l’ensemble des acteurs de la filière afin de changer la situation : « il existe une réelle prise de conscience des producteurs depuis 2010. Le constat est clair : sans effort, on va dans le mur. Cette prise de conscience s’est faite via les prises de position politique, l’implication des ONG sur le sujet entraînant parfois certains clivages mais également indéniablement, un changement global des mentalités. Désormais, le secteur évolue dans le bon sens avec un développement à triple hélice : économique, environnemental et social, et ce, grâce aux initiatives engagées par tous les acteurs de la filière. Depuis 2014, à l’initiative de la Commission, les Ministres en charge de la pêche et les Parlementaires européens ont fixé des objectifs, des règles du jeu et des moyens nécessaires pour mettre en place une pêche et une aquaculture plus durables et responsables. »
Entre autres, l’Europe a mis en place un certain nombre d’outils pour mieux gérer ses propres ressources et celles arrivant sur le marché européen afin de pallier aux déficiences des politiques européennes maritimes des années 80. Parmi ces outils, le nouvel étiquetage impose notamment, l’indication de l’engin de pêche et de la zone de capture.
La nouvelle norme d’étiquetage au niveau européen est, selon Christian Rambaud, « un support à la durabilité, un outil de communication entre producteurs et consommateurs pour faciliter la lecture et se repérer dans les achats. »
Chaque étiquette doit désormais indiquer la zone de pêche et la technique de capture utilisée. Ainsi il sera plus aisé de vérifier si l’espèce provient d’un stock en bon état et s’il a été pêché avec une technique respectueuse de l’environnement.
« La montée de la demande en consommation responsable implique pour les producteurs de parler différemment de leurs produits. La mise en oeuvre de ces nouvelles règles d’étiquetage est un réel challenge à relever pour l’ensemble des acteurs de la filière, mais également pour la presse, pour les enseignants, pour tous ceux qui ont un rôle à jouer dans la prise de conscience du consommateur, devenu un réel consom’acteur. Ce n’est pas l’étiquette en elle-même, mais la communication qui sera faite autour, qui fera bouger les choses. »
Quant aux difficultés pour la mise en oeuvre de cette nouvelle réglementation, « nous sommes à l’aube d’une nouvelle ère. Tous les produits sont désormais sur un pied d’égalité, le choix final est laissé au consommateur. C’est désormais une question de temps car la notion de développement durable est tout à fait relative, ce qui nous semble aujourd’hui hautement contraignant, paraîtra non durable pour les générations à venir. »
Le grand enjeu des années à venir reste encore la prise de conscience des enjeux environnementaux dans les autres régions du monde, africaine et asiatique en tête.
« L’Europe soucieuse de contribuer à une meilleure gouvernance des océans, est désormais la plus avancée sur ce sujet, la prise de conscience à l’échelle mondiale est plus lente. Certains pays représentent de grandes puissances de pêche, mais ne sont pas encore totalement impliqués dans l’instauration d’une pêche durable. Le marché européen étant le premier marché mondial et le plus solvable, l’Union européenne a le pouvoir commercial de faire bouger les choses. Actuellement, l’Europe importe 65 % des produits de la mer qu’elle consomme. Sa législation, empêchant l’entrée sur le territoire de produits issus de la pêche illégale ou ne faisant pas l’objet de régulation à l’échelle du pays pêcheur, est un instrument incontesté pour faire bouger les lignes également de l’autre côté du monde. »